on La formation des maîtres en formation à distance : modalités et encadrement
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La formation des maîtres en formation à distance : modalités et encadrement

Cet article a pour but de contextualiser le principe de la formation des maîtres à la formation à distance collégiale québécoise. Pour ce faire, l’analyse portera principalement sur une recension des pratiques effectuée par Mary Burns (Distance Education for Teacher Training: Modes, Models, and Methods), ainsi que sur une recherche de Daniel LaBillois et de Martine St-Germain (Accompagnement des enseignants du collégial dans un contexte d’innovation pédagogique).

La formation à distance, définie par Burns (2011, p. 9) comme « la séparation quasi permanente de l’instructeur et de l’apprenant », prend de plus en plus de place dans le milieu de l’éducation, et ce, partout dans le monde. Cette séparation transforme le rôle du professeur, qui devient alors très dépendant du mode de diffusion tant pour la présentation de sa matière que pour sa conception pédagogique. Au Québec, bien qu’il existe des programmes d’enseignement sur la pédagogie appliquée à l’enseignement supérieur, les professeurs collégiaux sont sélectionnés selon leur expertise-matière, et non selon leur expertise pédagogique. En cela, ils diffèrent des professeurs de l’enseignement primaire et secondaire. Il existe aussi certains programmes crédités d’enseignement en formation à distance, mais ils ne sont nullement obligatoires pour donner un cours à distance. Bref, cela signifie que les professeurs sont souvent peu outillés lorsque vient le temps d’enseigner à distance. Pour pallier ce manque, les collèges misent sur le développement professionnel des professeurs. C’est dans ce cadre qu’un programme de formation des maîtres prend tout son sens.

En quoi consiste la formation des maîtres?

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(Source: geralt/Pixabay)

Le but premier d’un programme de formation des maîtres est de développer de « bons » pédagogues qui, à leur tour, donneront un enseignement de qualité (Burns, 2011). De nombreuses études américaines démontrent que la meilleure corrélation avec le succès des étudiants est la préparation et la certification du professeur, bien qu’il existe d’autres facteurs comme le ratio professeur-étudiants et l’expérience du professeur. Ainsi, ce sont les étudiants ayant le plus de difficultés qui bénéficient le plus de l’amélioration de l’efficacité de l’enseignement. Parmi les cinq critères les plus généralement cités d’un bon professeur, on retrouve la connaissance du contenu pédagogique, qui se rapporte entre autres à la maîtrise du matériel pédagogique, de la technologie et des médias, ainsi que des stratégies pour les appliquer.

Sans un développement professionnel conséquent, les initiatives d’enseignement à distance risquent d’échouer. Un nombre d’heures conséquent doit y être consacré par année afin d’y déceler une amélioration, car un enseignement de grande qualité demande un développement professionnel de grande qualité. Pour ce faire, il faut prévoir du temps de libération, de l’encadrement et des ressources. Sept critères d’efficacité du programme de développement professionnel ont aussi été identifiés (Burns, 2011). Ce programme doit :

– Être axé sur le long terme;

– Être séquentiel;

– Être différencié selon les besoins et les réalités des professeurs;

– Offrir la possibilité aux professeurs de voir et d’étudier la pratique voulue;

– Aider les professeurs à planifier et à concevoir des applications en classe;

– Donner aux professeurs du temps de pratique et de la rétroaction;

– Avoir l’opportunité de réviser.

De plus, il faut privilégier les activités interactives qui demandent un engagement (telles que le mentorat, des groupes d’étude, l’observation et l’évaluation) par rapport à des ateliers de formation. Il est aussi important que ces formations visent à développer les compétences des professeurs plutôt que leurs connaissances : « Il serait souhaitable que les formations proposées s’attachent davantage à développer des compétences d’autoformation qu’à former les apprenants sur des aspects particuliers. » (Coen, 2012, p. 144). Par contre, un système de développement professionnel ne saurait se substituer à un système éducatif qui ne supporte pas, n’évalue pas et n’engage pas les professeurs.

Un autre aspect important est la construction d’une communauté de pratique. La présence d’une communauté de pairs est d’ailleurs jugée critique pour la satisfaction envers un programme de développement professionnel. Cela permet en quelque sorte de poursuivre le développement professionnel en donnant l’opportunité d’approfondir les réflexions engagées. Ces communautés ont aussi un impact direct sur l’enseignement, notamment dans les domaines suivants (Burns, 2011) :

– Renforcement des compétences;

– Adoption de nouvelles habiletés;

– Amélioration de l’implantation d’idées ou de stratégies;

– Entretien d’un répertoire partagé de bonnes pratiques;

– Augmentation du capital social;

– Création d’un environnement collaboratif pouvant aider les nouveaux professeurs;

– Formation d’un ethos de collégialité, de partage et de collaboration;

– Support dans le changement;

– Augmentation de la participation au changement.

Ces communautés ne se développent pas par elles-mêmes sans définition de besoins et elles ne peuvent être pérennes sans un certain support, passif ou actif, de l’institution. Pour les collèges, encourager les communautés de pratique peut avoir plusieurs avantages (Burns, 2011) :

– Fournir un support émotionnel, logistique et procédural;

– Créer un réseau de professionnels axé sur l’amélioration d’un but commun;

– Rendre possible la création et le partage de connaissances dans un domaine précis;

– Rendre publiques les connaissances professionnelles tacites qui étaient auparavant privées.

Il se peut aussi que la communauté de pratique ne soit pas la solution idéale, selon les problématiques rencontrées. Il existe aussi d’autres types de communautés, comme la communauté d’intérêts et la communauté d’apprentissage, qui ont aussi leur pertinence. Il reste très important de choisir le type de communauté qui sied le mieux au but recherché.

Le support dans le changement

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(Source: Brida_staright/Pixabay)

Tout programme de formation des maîtres nécessite de donner un support aux professeurs, surtout en enseignement à distance, parce qu’il tend à les isoler. Cela est même lié à la satisfaction et à la performance des professeurs. En effet, un programme de formation des maîtres vise à changer de façon importante des aspects fondamentaux de la pratique des professeurs, comme leurs connaissances, habiletés, attitudes, croyances, aptitudes et valeurs. Un tel changement de paradigme, à la fois complexe et ambitieux, ne saurait se faire sans un encadrement conséquent (Burns, 2011) :

– Le support doit s’appuyer sur le fait que ce ne sont pas tous les professeurs qui ont la même vision du changement et qui adoptent le changement au même rythme.

– Le support fourni doit être en lien à la fois avec la complexité du changement et les attentes par rapport aux résultats. Cela signifie que le support octroyé devra être plus important si le changement demandé est complexe et si les attentes sont élevées.

– L’adoption du changement se compte en années et non en mois. Le support devrait être planifié en conséquence.

– Ce support doit être arrimé aux préoccupations du professeur, et il doit être différencié en conséquence.

– Des évaluations diagnostiques et formatives doivent être faites en continu afin d’adapter les mesures de support.

Le concept de support reste malgré tout assez large. Dans le cadre d’un programme de formation des maîtres, le support peut prendre plusieurs formes (Burns, 2011) :

– Administratif : Support des gestionnaires concernant à la fois la philosophie de changement et les ressources mises à la disposition du changement.

– Pédagogique : Aide aux changements conceptuel, théorique et logistique de la nouvelle approche à l’apprentissage.

– Pairs : Support d’une communauté de pratique, formelle ou informelle, à l’adoption du changement.

– Technique : Aide à l’utilisation de la technologie, mais offre aussi d’un support rapide en cas de problèmes qui y sont liés.

– Communauté : Support formel ou informel de la communauté quant au changement apporté à l’enseignement.

– Matériel d’enseignement et d’apprentissage : Avoir accès à des ressources matérielles authentiques et appropriées.

– Temps : Temps de libération accordé afin de mettre en place le changement et planifier les activités en conséquence.

La demande de support par les professeurs doit être vue comme positive, car elle signifie souvent que le changement est en voie d’être accepté et mis en place. La réponse du Collège à cette demande pourra avoir un impact sur l’acceptation ou non du changement proposé. Afin de connaître du succès, ce programme devra être axé autour de trois stratégies (Burns, 2011) :

– Obtenir le support de la direction. Il existe un lien clair entre le support actif de la direction et le succès du développement professionnel des professeurs. De plus, en obtenant ce support, les objectifs et priorités de la direction s’arriment à celles des professeurs, ce qui permet d’avoir accès à des ressources en lien avec le projet.

– Impliquer une masse critique de professeurs dans le développement professionnel. Le succès du programme de développement professionnel dépend de sa place dans le plan de développement du collège. Si un nombre suffisant de professeurs sont impliqués, le programme pourra se subvenir à lui-même et développer une communauté de pratique autour du projet.

– Offrir du mentorat par un spécialiste à l’intérieur du programme de développement professionnel. L’apport de mentorat est très important pour transférer les notions du programme de développement professionnel vers les salles de classe. Cela permet de différencier l’apprentissage et de répondre directement aux préoccupations des professeurs.

Dans cet environnement, une attention particulière doit être portée aux professeurs novices, qui sont plus à risque que leurs collègues plus expérimentés, qui eux peuvent puiser dans leurs expériences passées pour les guider dans le changement. En effet, l’isolement demeure un des principaux facteurs de l’attrition des professeurs. Il est donc spécialement important dans ce contexte d’avoir un programme d’insertion professionnelle. Les activités de ce programme, qui peuvent aller de simples activités d’orientation à des cours en bonne et due forme, permettent à la fois d’améliorer la qualité de l’enseignement et de réduire l’attrition. Ces programmes peuvent aussi inclure un plan personnalisé, une réduction des responsabilités, du développement professionnel crédité, des séances d’observations et la possibilité d’assister à des cours de collègues expérimentés, entre autres. L’ajout d’une composante d’encadrement, que ce soit par jumelage ou par mentorat, renforce encore plus ces programmes et donne de meilleurs résultats. Il est aussi important de s’assurer que ceux qui agissent comme mentors soient eux aussi bien formés à ces responsabilités pour lesquelles ils n’ont souvent pas eu de formation eux-mêmes. Ces formations doivent aussi s’intégrer au programme plus large de développement professionnel.

Si le changement est essentiel à la croissance et à l’amélioration d’un collège, son acceptation peut être difficile et prendre du temps (Burns, 2011). Il s’accompagne souvent de bouleversements dans les pratiques et d’incertitudes dans les choix à prendre. C’est pourquoi la présence d’un agent du changement qui prend en compte la longueur, la durée et la complexité du processus de changement doit être considérée lors du déploiement d’un programme. C’est dans ces conditions que le processus de changement pourra être un succès.

Étude de cas : la formation à distance au Cégep de la Gaspésie et des Îles

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(Source: willsong/Pixabay)

Depuis le début des années 2000, le Cégep de la Gaspésie et des Îles est aux prises avec un problème de baisse démographique importante qui affecte la viabilité de plusieurs de ses programmes techniques, et ce, malgré un besoin élevé de main-d’œuvre qualifiée dans la région. Parmi les problèmes, on retrouve aussi une dispersion de la clientèle sur un vaste territoire, dont une partie de la population ne veut pas se déplacer pendant plusieurs années afin de se former, notamment pour des questions liées à l’emploi. Afin de remédier à cette situation, le Cégep a mis beaucoup d’efforts à déployer une offre de formation à distance. C’est dans ce contexte que Daniel LaBillois et Martine St-Germain ont fait une étude sur un programme basé sur l’accompagnement.

Le type de formation à distance privilégié par le Cégep est la téléprésence, qui est basée sur un système de visioconférence fidèle et fiable. Ce choix a été fait parce que c’est la solution technologique qui transforme le moins l’enseignement traditionnel, mais aussi parce qu’« il s’agit de la technologie qui exige le moins d’adaptation et de développement des compétences en technologies de l’information et des communications (TIC) de la part de l’enseignant. » (LaBillois & St-Germain, 2014, p. 11). Malgré la convivialité de l’interface, les professeurs ont fait face à un changement de paradigme de leur enseignement. L’idée d’un encadrement pédagogique des professeurs est apparue suite à leurs craintes initiales relatives à la technologie : « Ce n’est qu’après s’être adapté aux instruments disponibles que les enseignants ont abordé les enjeux pédagogiques. » (LaBillois & St-Germain, 2014, p. 13).

Le dispositif choisi par le Cégep de la Gaspésie et des Îles peut être qualifié d’hybride, car il inclut à la fois une portion d’étudiants en présence et une portion d’étudiants à distance (Lebrun, Peltier, Peraya, Burton, & Mancusco, 2014). Le choix a été d’utiliser le type de dispositif appelé « La scène », car il est centré « sur le processus d’enseignement et la transmission de contenus en présence » Lebrun et al. (2014, p. 64). Ce choix de type de formation hybride a orienté l’encadrement offert aux professeurs. Il est aussi intéressant de noter que plusieurs professeurs utilisent souvent des outils technologiques qui peuvent servir à l’enseignement hybride à distance. Cela peut servir de point de départ au processus d’encadrement, en partant d’outils que les professeurs connaissent.

Relativement à cette situation, les deux chercheurs ont décidé d’utiliser une stratégie d’accompagnement des professeurs à la formation à distance. Cette approche a été jugée la plus adaptée pour plusieurs raisons :

– Les professeurs du réseau collégial disposent d’une grande autonomie quant à leurs modes et méthodes d’enseignement;

– Les professeurs visés par le programme ont plusieurs années d’expérience en enseignement traditionnel et sont des experts dans leur discipline, mais pas en pédagogie ni en formation à distance;

– Ce sont tous les professeurs du département qui devaient passer à la formation à distance, ce qui donnait une masse critique pour l’établissement d’une communauté de pratique;

– L’administration du Cégep supportait à la fois la formation à distance et la démarche d’encadrement entreprise.

L’accompagnement des professeurs vers la formation à distance

Dans ce contexte, la structure de la relation d’accompagnement pouvait prendre deux formes : un pouvoir directif, plutôt vertical, s’apparentant à une structure hiérarchique; ou un pouvoir partagé, plutôt horizontal, s’apparentant à une structure collaborative. L’approche du pouvoir partagé a été retenue, compte tenu du fait qu’elle est mieux adaptée au milieu professionnel de l’enseignement collégial. Cette approche n’est pas sans embuches, car il faut construire un lien de confiance avec les professeurs, ce qui n’est pas toujours facile. Cela nécessite aussi que l’accompagnateur, qui est souvent un expert dans son domaine, ne se transforme pas en formateur. En effet, l’accompagnateur doit laisser les professeurs définir leurs besoins, sinon il perdra leur confiance, car ces derniers se sentiront envahis : « Ainsi, cette personne qui accompagne pourrait avoir tendance à vouloir passer tout ce savoir à la personne accompagnée, à faire de la formation, alors que la personne accompagnée ne veut que répondre à son besoin ponctuel, sans plus. » (LaBillois & St-Germain, 2014, p. 113). L’accompagnateur doit être capable de limiter son intervention à ce qui lui a été demandé par les professeurs pour que cette approche fonctionne.

Pour que l’accompagnement fonctionne, l’accompagnateur doit développer une relation de confiance avec les professeurs, afin que ceux-ci puissent exprimer leurs besoins sans se sentir jugés ou évalués. Les interventions seront ainsi beaucoup mieux ciblées et auront plus de chance d’avoir un impact sur la pratique. Il est aussi très important que l’accompagnateur soit présent lorsqu’on a besoin de lui : « Les chercheurs n’ont jamais décidé pour les enseignants au cours de la recherche et ils répondaient rapidement aux demandes de ceux-ci. » (LaBillois & St-Germain, 2014, p. 116).

Les réponses offertes par l’accompagnateur se doivent d’être à la fois rapides et pertinentes. À cet effet, l’accompagnateur doit être capable de déterminer le point focal de son intervention. Celui-ci doit prendre en compte trois facteurs (LaBillois & St-Germain, 2014) :

– Les retombées pédagogiques : L’intervention doit permettre de répondre immédiatement et de façon satisfaisante au besoin du professeur.

– Le temps : L’intervention ne doit pas demander un trop grand investissement de temps pour être implantée.

– Les efforts : L’intervention ne doit pas demander trop de travail, en tenant compte de la charge de travail du professeur.

Afin de trouver le point focal qui sied à chaque professeur, il faut que la relation de confiance soit bien établie. Il faut aussi que l’accompagnateur soit à l’écoute, car les besoins peuvent changer rapidement : « Le point focal de l’enseignant peut changer rapidement; il faut donc demeurer à l’écoute de celui-ci et rétroagir rapidement à ses demandes pour toujours maintenir une relation d’accompagnement efficace et de qualité. » (LaBillois & St-Germain, 2014, p. 122). Si l’accompagnateur réussit à bien cibler son intervention, le professeur sera beaucoup plus à même d’accepter le changement et de poursuivre son cheminement.

Une fois la relation de confiance établie, les professeurs seront plus enclins à vouloir obtenir une validation de leur enseignement en classe. En effet, ils n’ont que très peu souvent la chance d’avoir un retour sur leurs bonnes pratiques. En ce qui a trait aux points à améliorer dans leur pratique professionnelle, « l’observation en classe et la rétroaction individuelle ont permis une validation des pratiques pédagogiques de l’enseignant. » (LaBillois & St-Germain, 2014, p. 123). Ce processus de validation est important, car « (…) il a permis de consolider l’identité professionnelle pédagogique des enseignants. » (LaBillois & St-Germain, 2014, p. 124). Comme la plupart des professeurs collégiaux n’ont pas de formation en pédagogie, cela les conforte dans leur rôle de pédagogue et rend leurs pratiques légitimes à leurs yeux et à ceux de leurs pairs.

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(Source: janeb13/Pixabay)

Ainsi, le processus de changement de s’amorcer : « La confirmation de l’identité pédagogique de l’enseignant représente une phase importante qui doit être franchie avant de proposer un changement pédagogique. » (LaBillois & St-Germain, 2014, p. 138). En tant que professionnels de l’enseignement, les professeurs de niveau collégial ont une triple identité (LaBillois & St-Germain, 2014) :

– Une identité disciplinaire : Elle est associée à une formation universitaire et est sanctionnée officiellement par une autorité reconnue. C’est l’identité la plus solide, qui est reconnue concrètement par l’employeur et par les pairs, et qui est indiscutable.

– Une identité relationnelle : Elle se bâtit dans l’interaction autour de la pratique professionnelle du professeur. Elle est liée à l’utilisation du savoir et du savoir-faire avec les membres de la communauté collégiale.

– Une identité pédagogique : Elle est liée à la reconnaissance du professeur en tant que pédagogue, et n’est pas toujours sanctionnée officiellement. Cette identité est souvent plus fragile, car elle ne s’appuie pas sur des critères concrets et n’est pas nécessairement reconnue par l’employeur et par les pairs, bien qu’elle fasse partie intégrante des compétences requises pour le professeur.

Les professeurs ont, dès leur embauche, une identité disciplinaire bien ancrée. Leur identité relationnelle, elle, se bâtit à force d’expérience et est reconnue par les autres à force d’interactions. L’identité pédagogique, moins visible, est plus difficile à partager. Par contre, une fois cette identité reconnue, les professeurs développent une cohérence professionnelle, où ils participent activement aux échanges pédagogiques. Cela enlève des barrières, et les professeurs n’ont plus peur d’échanger et de partager leurs expériences pédagogiques.

Une fois l’identité pédagogique confortée, les professeurs entrent dans une zone de développement professionnel, où leur relation avec l’accompagnateur va évoluer en fonction des besoins. Il existe trois phases (LaBillois & St-Germain, 2014) :

– La phase de confiance : C’est à ce moment que la relation de confiance entre l’accompagnateur et les professeurs se construit, notamment dans l’expression du besoin. Elle est essentielle, sinon elle mènera au rejet du processus. C’est une phase intense pour l’accompagnateur, car il doit être capable de répondre correctement et rapidement aux besoins des professeurs et leur servir de guide.

– La phase d’expérimentation : Une fois que les professeurs ont confiance dans le processus, ils choisiront un projet, lié à un objectif précis. Ils expérimenteront par eux-mêmes et chercheront à valider leurs nouvelles pratiques. Le rôle de l’accompagnateur sera alors de conseiller les professeurs.

– La phase d’émancipation : Les professeurs embrassent alors leur identité pédagogique et échangent ouvertement sur le sujet avec leurs pairs dans les tribunes prévues à cet effet. Ils ont acquis une autonomie professionnelle, où l’accompagnateur joue un rôle de support.

Le rôle de l’accompagnateur s’efface peu à peu et, au lieu d’être au centre des discussions, ce dernier devient un collaborateur au même titre que les professeurs.

La zone de développement professionnel a été rendue possible par l’approche de pouvoir partagé, qui a développé un sentiment de communauté. La pédagogie occupe alors une place importante dans les rencontres départementales. Le département a ainsi développé une force pédagogique qui n’est plus concentrée dans les mains d’un expert, mais partagée par tous : « c’est l’ensemble des savoirs de tous les enseignants qui sont mis à contribution dans la recherche de solutions ou de propositions. » (LaBillois & St-Germain, 2014, p. 145). Ainsi, tous les professeurs deviennent des expérimentateurs qui peuvent partager avec les autres leurs résultats, qu’ils soient positifs ou négatifs.

Bilan

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(Source: quinntheislander/Pixabay)

La place de la formation à distance restera un enjeu important pour les prochaines années. Comme on a pu le constater, la formation des professeurs, notamment à l’enseignement collégial, est une problématique sur laquelle il faudra se pencher pour que le passage vers la formation à distance d’une partie de l’enseignement se fasse de façon harmonieuse. Des études internationales ont montré l’importance de former et d’encadrer les professeurs afin de favoriser à la fois la réussite des étudiants et le développement de « bons » professeurs en formation à distance.

Le Cégep de la Gaspésie et des Îles, avec sa formule d’accompagnement, a trouvé une méthode efficace et porteuse de résultats. Cette méthode a l’avantage d’être une recette qui peut être modifiée selon les programmes, les solutions technologiques et les modes d’enseignement choisis. Elle est aussi cohérente avec la situation professionnelle des professeurs de niveau collégial et avec leurs réalités.

(Source image principale: janeb13/Pixabay)

BIBLIOGRAPHIE

Burns, Mary. (2011). Distance education for teacher training : modes, models, and methods (pp. 338). Washington, DC: Education Development Center Inc.

Coen, Pierre-François. (2012). Formation aux TICE des formateurs d’enseignants : un tissage entre formation et autoformation. Revue internationale des technologies en pédagogie universitaire, 9(1-2), 136-147.

LaBillois, Daniel, & St-Germain, Martine. (2014). Accompagnement enseignants collégial dans un contexte d’innovation pédagogique (pp. 197): Cégep de la Gaspésie et des îles, Cégep de l’Outaouais.

Lebrun, Marcel, Peltier, Claire, Peraya, Daniel, Burton, Réginald, & Mancusco, Giovanna. (2014). Un nouveau regard sur la typologie des dispositifs hybrides de formation. Propositions méthodologiques pour identifier et comparer ces dispositifs. Education & Formation, e-301, 55-74.

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