Cet article a pour but de mettre en évidence le rôle de la collaboration et de l’interaction en formation à distance et de l’utilisation de certains outils technologiques pour y parvenir.
L’émergence des technologies de l’information et des communications en enseignement (TIC en enseignement, ou TICE) a bouleversé le monde de l’éducation postsecondaire. D’un côté, la formation à distance a pris de plus en plus de place dans le monde académique grâce à l’accessibilité et à la diversification des moyens de diffusion. Elle est en évolution constante et tend à se transformer au fil des nouveautés technologiques qui émergent (Burns, 2011). D’un autre côté, la majorité des professeurs de niveau collégial sont avant tout des experts-matière, qui ont peu ou pas de formation en pédagogie, et encore moins en enseignement à distance. Cela crée une situation où ces professeurs doivent apprendre à enseigner à la fois dans un autre paradigme et avec des outils qu’ils connaissent peu (LaBillois & St-Germain, 2014). Adapter un bon cours de formation présentiel en bon cours de formation à distance nécessite beaucoup de travail et ne se fait pas sans transformer de façon importante la façon d’enseigner.
Afin de préparer les professeurs à effectuer cette transition, il existe plusieurs voies, dont les plus pertinentes sont la formation en situation authentique et le développement professionnel sur une période de temps étendue (Burns, 2011). Des stratégies d’accompagnement ont aussi porté leurs fruits, notamment lorsque les professeurs sont obtiennent de l’aide selon leur rythme et leurs besoins (LaBillois & St-Germain, 2014). Bien que les technologies utilisées changent, les besoins restent les mêmes, que l’enseignement soit offert en mode synchrone, asynchrone ou hybride.
Les TIC et l’enseignement à distance
(Source: janeb13/Pixabay)
Il faut par contre bien choisir quelle utilisation des TIC en enseignement va être privilégiée, car cela n’est pas en soi un gage de réussite pédagogique. En effet, Barrette (2009), dans une méta-analyse, arrive à une conclusion intéressante : « la différence entre le fait d’utiliser ou non les TIC dans les interventions pédagogiques au collégial n’est pas significative. » (p. 19) La différence de résultat est presque nulle si on compare des interventions qui utilisent les TICE et d’autres qui ne les utilisent pas. Transformer un cours uniquement au niveau du mode de diffusion n’apporte donc rien de plus à l’apprentissage. Il faut que l’utilisation des TICE soit faite de manière concertée avec l’approche pédagogique pour obtenir des résultats : « L’intégration des TIC peut être efficace quand elle soutient d’une manière adaptée les approches pédagogiques appropriées aux objectifs des programmes d’études. » (Barrette, 2009, p. 20) Cela confirme qu’en formation à distance, l’efficacité nécessite que le moyen de diffusion doive être intimement lié au modèle pédagogique (Burns, 2011). Pour Deaudelin et Nault (2008), « les professeurs en formation des maîtres qui tiennent un discours pédagogique où l’apprentissage collaboratif est valorisé et mis en avant se doivent d’avoir une pratique pédagogique qui concorde avec les principes de collaboration qu’ils prônent. » (p. 11)
La grande diversification récente des TICE permet aujourd’hui de cibler les interventions pédagogiques en fonction des besoins en enseignement. Que cela soit en mode synchrone ou en mode asynchrone, les professeurs peuvent utiliser de nombreuses activités de façon très efficace, selon les besoins (Lemay & Mottet, 2009). Barrette (2009) identifie trois sphères d’activité où l’intégration des TIC en enseignement est appropriée :
– « des dispositifs adaptatifs et différenciés d’exercices répétés, comme des jeux éducatifs »;
– « des dispositifs favorisant la métacognition, comme des tutoriels »;
– « des dispositifs d’apprentissage collaboratif, comme des environnements virtuels de formation » (p. 20).
Dans un modèle socioconstructiviste, l’hybridation de la formation à distance permet de profiter des avantages de la formation synchrone et de la formation asynchrone selon la pertinence des activités pédagogiques : « En effet, les apprenants peuvent alors profiter d’activités en mode asynchrone pour approfondir des notions à leur rythme et participer à des séances synchrones en face à face pour collaborer avec les autres apprenants et confronter leurs connaissances. » (Lemay & Mottet, 2009, p. 48) Cela demande toutefois de bien choisir les activités, car « certaines méthodes traditionnelles se révèlent peu appropriées dans ce nouveau contexte. » (Lemay & Mottet, 2009, p. 48) La formation à distance offre donc de nombreuses possibilités de bonification de l’enseignement, et ce, peu importe le mode de diffusion. Par contre, afin d’être efficaces, les professeurs doivent être capables de bien choisir ces activités selon le contexte d’apprentissage et d’avoir les ressources pour les mettre en place.
En effet, l’intégration des TIC dans la pratique pédagogique est intimement liée à des choix administratifs et technologiques faits par l’établissement, mais aussi au fait que « l’intégration efficace des TIC demande un niveau de compétence adéquat des usagers (professeurs et élèves) qui varie d’un établissement à l’autre selon ses conditions organisationnelles. » (Barrette, 2009, p. 20) Il faut prendre en compte le fait que l’utilisation d’une technologie nécessite à la fois l’achat d’équipement, mais aussi son entretien, son appropriation par le personnel technique et la formation du corps professoral à son utilisation. Cela nécessitera aussi « des changements de pratiques chez les professeurs et ces changements sont aussi très sensibles aux conditions organisationnelles de chaque établissement. » (Barrette, 2009, p. 20) Selon le mode de diffusion organisationnel, qu’il soit plutôt synchrone ou asynchrone, le choix des technologies utilisées variera grandement. Finalement, l’utilisation des TIC doit permettre un gain de temps affecté aux tâches des professeurs, sans quoi même avec un programme de perfectionnement technopédagogique clé en main, l’utilisation des TICE demeurera marginale dans la pratique (Barrette, 2009).
L’importance de la collaboration et de l’interactivité
(Source: dschap/Pixabay)
La réalité des apprenants s’est transformée. L’offre de cours traditionnels en classe n’est plus adaptée à de nombreux étudiants qui ont des obligations familiales et professionnelles (Lemay & Mottet, 2009, p. 48). Ceux-ci se tournent de plus en plus vers la formation à distance pour répondre à leurs besoins. Leur situation fait en sorte qu’ils se retrouvent peu en contact avec le milieu scolaire et sont souvent isolés de leurs pairs pour la même raison.
Selon les recherches, la présence d’interactivité et de collaboration dans les activités est liée à la réussite et la persévérance dans des cours à distance (Burns, 2011). Bien que cette notion soit de plus en plus connue, elle n’est pas appliquée de façon systématique dans les cours à distance pour plusieurs raisons : « Malgré tout, il semble que, dans la majorité des formations à distance, on accorde encore une faible place au dialogue, une situation qui s’explique en partie par la prépondérance du mode asynchrone et par l’importance qui est accordée à la liberté dans le choix de l’horaire de formation. » (Lemay & Mottet, 2009, p. 48) Bien que le mode de diffusion puisse avoir un impact certain sur la persévérance, il est possible d’agir sur celle-ci par diverses stratégies. En mode asynchrone, la personnalisation des interventions des tuteurs a un impact non négligeable sur la rétention des étudiants (Poellhuber, Chomienne, & Karsenti, 2011). On constate aussi un manque d’interactivité et de collaboration en mode synchrone et hybride. Cela s’explique entre autres par le manque de maîtrise avancée des outils technologiques mis à la disposition des professeurs (Barrette, 2009), mais aussi par le fait que les professeurs sont souvent des néophytes de la pédagogie à distance et qu’ils tendent à répéter des activités qui fonctionnent bien en salle de classe traditionnelle, mais moins bien en classe virtuelle (LaBillois & St-Germain, 2014). Deaudelin et Nault (2008) constatent que « de la part de l’enseignant, l’introduction d’activités d’apprentissage collaboratif dans son enseignement en mode virtuel exige une certaine vision de l’apprentissage, des compétences en design pédagogique et des habiletés liées à la création d’environnements virtuels qui soient favorables à la collaboration. » (p.49-50)
Dejean-Thicuir (2010) définit les compétences interactionnelles comme « les procédés que les interlocuteurs emploient méthodiquement pour organiser leur interaction » et la collaboration comme étant « un processus par lequel des individus négocient et échangent des significations pertinentes par rapport à une tâche de résolution de problème » (p. 34). De leur côté, Lemay et Mottet (2009) ont présenté une liste de 16 activités qui permettent de construire un environnement d’apprentissage dans un cours en ligne : « atelier programmé, conférence, démonstration, discussion de groupe, enseignement magistral, étude de cas, étude indépendante, expérimentation, jeu de rôle, projet, questionnement, recherche, répétition, simulation, travail d’équipe et tutoriel. » (p. 49) Ces activités peuvent être réalisées en contexte synchrone ou asynchrone, selon le contexte. Il faut par contre faire attention aux séquences d’apprentissage. Par exemple, un enseignement magistral de longue durée pourra nuire à la participation aux autres activités, car il peut rendre les étudiants passifs et moins enclins à se mobiliser (Lemay & Mottet, 2009, p. 52).
Bien que l’on appuie les mérites de la collaboration, Henri et Lundgren-Cayrol (2003) soulignent que « … la collaboration, surtout en mode virtuel, est, elle aussi un exercice qui s’apprend. Savoir collaborer n’est pas inné : cela s’apprend, au même titre que des connaissances ou des compétences disciplinaires.» (p.152)
Outre les impératifs d’intégration des TIC à leurs cours (Barrette, 2009), les professeurs doivent aussi prendre en compte le fait que « le confort technologique joue un rôle important pour les apprenants. » (Lemay & Mottet, 2009, p. 53) Cela rend la tâche d’enseigner à distance encore plus complexe, car cela ajoute un autre aspect dont il faut tenir compte dans la planification des activités.
Une proposition d’outils pour développer la collaboration et l’interactivité
(Source : geralt/Pixabay)
Il existe de nombreuses études sur le bienfait d’activités de collaboration et d’interaction qui sont déjà largement utilisées par les professeurs en formation à distance, comme le clavardage ou les études de cas (Burns, 2011). Deaudelin et Nault (2008) nous rappellent que « de nombreuses études ont montré qu’on apprenait plus en collaborant avec ses pairs qu’en travaillant de manière isolée. En se formant de façon collaborative, les apprenants peuvent partager des travaux, des informations ou des expériences vécues et en discuter avec d’autres. En outre, plusieurs soulignent qu’un environnement d’apprentissage collaboratif accroît la communication. » (p. 87) Avec l’arrivée de nouvelles technologies, on constate que le nombre d’outils potentiels est en pleine croissance.
Dans les quatre sections suivantes, quatre types d’activités seront abordés. Bien qu’ils ne soient pas tous de dernière nouveauté, ils ont en commun d’avoir été encore peu étudiés dans le contexte de l’enseignement supérieur. Leur validité pédagogique reste donc à prouver. Par contre, ces quatre types d’activités semblent très prometteurs pour favoriser la collaboration et l’interaction dans un contexte de formation à distance qui soit synchrone, asynchrone ou hybride.
Jeux sérieux
(Source: Tomasz_Mikolajczyk/Pixabay)
Bien que le jeu sérieux soit une approche pédagogique répandue dans l’enseignement traditionnel en classe (on peut penser à l’idée de s’amuser pour apprendre), ce n’est que plus récemment qu’il a fait son apparition en enseignement à distance. Défini comme étant une « application informatique intégrant des aspects à la fois ludiques et éducatifs » (St-Pierre, 2010, p. 4), le jeu sérieux à distance tend à intégrer des aspects des jeux vidéo populaires, par exemple un système de points ou des tâches à effectuer dans un temps limité (Muntean, 2011).
Le but du jeu sérieux est d’augmenter l’engagement des apprenants en utilisant des techniques largement utilisées avec succès dans les jeux vidéo (Muntean, 2011, p. 323). Par contre, pour être efficace, le jeu sérieux doit posséder des caractéristiques qui amènent à l’apprentissage, soit « des instructions claires, un niveau de motivation et de défi suffisant et, enfin, la possibilité d’avoir le contrôle sur certaines options du jeu comme la vitesse, le niveau de difficulté, les effets visuels et sonores et le type de rétroaction. » (St-Pierre, 2010, p. 5) L’avantage d’un jeu sérieux bien construit est d’augmenter la motivation aux études en stimulant l’apprentissage (Muntean, 2011, p. 328). C’est aussi une excellente façon de créer un environnement interactif en enseignement asynchrone, où il est plus facile pour les étudiants de perdre leur motivation.
Par contre, il y a peu de recherches concernant l’utilité des jeux sérieux en éducation (Muntean, 2011, p. 325). En effet, créer un jeu sérieux à la fois intéressant et pédagogique est un grand défi. St-Pierre (2010) note quatre défis principaux à surmonter :
– « Difficulté pour les enseignants non formés à identifier ce qui peut apparaître pertinent d’un point de vue pédagogique dans tel ou tel jeu et quelles sont les relations possibles pouvant être établies entre le jeu et le curriculum;
– Difficulté à promouvoir le potentiel éducatif et pédagogique des jeux vidéo au sein du corps professoral;
– Manque de temps et de ressources pour se familiariser avec les environnements de jeux et pour développer des scénarios pédagogiques efficaces intégrant des jeux vidéo dans le curriculum;
– Difficulté à se concentrer exclusivement sur les éléments pertinents d’un jeu. Trop de fonctionnalités venant distraire l’utilisateur. » (p. 9)
Bien que le potentiel des jeux sérieux soit très grand, spécialement au niveau de l’interactivité et de la motivation, peu de professeurs osent en développer, principalement par manque de temps, de ressources et d’aptitudes liées à la pédagogie ludique. Par contre, son potentiel en enseignement à distance, spécialement asynchrone, est immense.
Applications sociales en ligne
(Source: geralt/Pixabay)
Les applications sociales en ligne sont très présentes dans la vie personnelle des étudiants, mais peu dans leur vie scolaire. Bien que certaines tentatives aient été faites de créer des réseaux sociaux liés à l’éducation (Béliveau, 2011), les résultats ont été mitigés. Par contre, les applications Internet 2.0 comme le blogue et le forum de discussion sont très intéressants, notamment parce qu’ils laissent des traces qui peuvent ensuite être évaluées (Vigneault, 2006).
Pour être considéré comme une application sociale, il faut que celle-ci permette l’interaction directe. Le blogue est un outil pédagogique intéressant par « la possibilité qu’il offre aux lecteurs de commenter les billets de l’auteur à même la page Internet, de même que son dynamisme et son interactivité. » (Bachand, 2010) Un forum peut servir à répondre à des questions et donner des consignes, mais ce qui en fait un outil social est qu’il « peut aussi être utilisé pour animer des discussions dirigées ou servir au développement de diverses activités pédagogiques qui ont pour but d’aider l’étudiant à apprendre et à construire sa connaissance. » (Vigneault, 2006)
Pour bien intégrer les applications sociales en ligne aux cours, il est important de respecter certaines règles :
– Afin d’être efficace, il faut que cette approche ne soit pas périphérique au cours, mais qu’elle y soit centrale, d’où l’importance de la sanctionner et de la commenter. (Vigneault, 2006)
– Bien qu’il soit important de noter les étudiants sur leur propre production, les noter sur leur contribution à celle des autres n’est pas particulièrement efficace. (Bachand, 2010)
– Pour améliorer l’efficacité de cette approche, les étudiants doivent être en mesure de contrôler leur mode de diffusion et leur message. (Bachand, 2010)
– Bien que la rétroaction du professeur soit importante, elle ne doit pas être omniprésente ni prendre le contrôle des discussions. (Vigneault, 2006)
Les applications sociales en ligne ont un grand potentiel pédagogique, bien qu’elles demeurent peu utilisées pour des activités pédagogiques centrales aux cours. Les mauvaises expériences des professeurs sont souvent liées au fait que leur utilisation de ces outils est faite de manière périphérique, et donc peu intéressante pour les étudiants.
Wikis
(Source: geralt/Pixabay)
Les wikis sont en quelque sorte des extensions des applications sociales en ligne. Un wiki peut être défini comme « un outil TIC qui permet de créer et d’éditer des contenus, tout en permettant d’organiser l’information par thèmes. De plus, les échanges entre les étudiants et les commentaires du professeur encouragent la régulation. » (Duchesneau, Lachaîne, & Provost, 2012, p. 5) Bref, les wikis sont des outils de construction collectifs du savoir où la collaboration et l’interaction sont de mise.
Bien que le travail du wiki soit collectif, il est possible d’évaluer la contribution de tous les participants, que cela soit par le professeur, par l’étudiant lui-même (autoévaluation) ou par ses pairs (Lai & Ng, 2011, p. 25). De plus, cela aide l’étudiant à comprendre comment sont construits les wikis qu’il consulte dans Internet et ainsi évaluer leur niveau de pertinence.
En tant qu’extension des applications sociales en ligne, les wikis ont aussi d’autres avantages liés à leur fonctionnalité particulière :
– Il permet de diagnostiquer afin de différencier l’apprentissage, ce qui est plus difficile à réaliser avec les autres applications sociales en ligne. (Duchesneau et al., 2012)
– Il peut servir d’outil pour aider à la persévérance par la collaboration et l’interactivité. (Lai & Ng, 2011, p. 25)
– Il permet de travailler à des tâches complexes favorisant un bon environnement d’apprentissage en ligne. (Duchesneau et al., 2012, p. 9)
Bien que les professeurs connaissent plutôt les wikis comme des outils de référence dans Internet, la fabrication d’un wiki a une portée pédagogique de plus en plus reconnue par la recherche. On retrouve de plus en plus d’outils en ligne permettant d’en construire un pour ensuite l’intégrer comme activité d’apprentissage à un cours.
Technologies mobiles
(Source: geralt/Pixabay)
L’émergence des technologies mobiles (ordinateurs portables, téléphones, tablettes, etc.) a transformé l’approche à l’information dans la société. Certains chercheurs ont même prédit que la technologie mobile allait un jour permettre un apprentissage vraiment indépendant du temps et du lieu, et ce, facilité par des ordinateurs portables fournissant interactivité, connectivité et puissance de traitement (Corbeil & Valdes-Corbeil, 2007, p. 52). Avec l’évolution technologique, cette approche semble de plus en plus réalisable.
Dans leur étude, Caron, Caronia, et Weiss-Lambrou (2007) en arrivent à ce constat : « Cependant, l’écoute “mobile” des contenus pédagogiques ne semble pas avoir été très populaire parmi nos répondants. Les raisons invoquées sont multiples, mais elles sont surtout liées aux habitudes de travail et à une représentation du contexte d’apprentissage qu’on pourrait qualifier de “traditionnelle”. » (p. 51) Ils expliquent ce constat par le fait que, « pour les étudiants, la consommation culturelle à des fins de carrière académique (voire passer les examens) requiert un setting, c’est-à-dire un espace balisé et a priori défini comme lieu d’apprentissage. » (p. 54) Ainsi, les étudiants n’utilisent pas les technologies mobiles dans un cadre académique comme ils le feraient dans un cadre social. Pour Caron et Al., cela constitue un paradoxe des étudiants mobiles : « ces mêmes itinérants technologiques, ces amateurs de vagabondage informationnel et communicationnel ne semblent pas apprécier l’itinérance informationnelle quand il s’agit d’apprendre des contenus disciplinaires. » (p. 53) Les étudiants semblent moins prêts au virage de l’enseignement mobile que leurs habitudes sociales le laisseraient croire.
Selon Caron et Al., certaines conditions sont importantes pour la pertinence des contenus mobiles dans un cours : « Les contenus pédagogiques doivent être courts. Leurs concepteurs doivent exploiter les possibilités du multimédia pour créer des contenus dynamiques et interactifs. Surtout, les contenus doivent être d’une grande pertinence par rapport au cours et nullement se substituer au professeur dans son rôle de source première. » (2007, p. 54) Pour Corbeil et Valdes-Corbeil (2007), l’adoption des technologies mobiles est liée au fait de savoir si les services et les fonctionnalités offerts sont efficaces et nécessaires (p. 57). Offrir la mobilité sans s’assurer de prendre en compte les limitations technologiques et pédagogiques causera à coup sûr des problèmes.
Bien que les professeurs ne soient pas étrangers à l’utilisation des technologies mobiles, leur utilisation dans un contexte scolaire est loin d’être répandue. Dans le domaine pédagogique, le contenu mobile est plus efficace lorsqu’il est bref et en appui à du contenu au mode de diffusion plus traditionnel. Les professeurs doivent plutôt l’approcher comme un complément à leur cours.
Bilan
(Source: geralt/Pixabay)
La formation à distance, qu’elle soit principalement synchrone, asynchrone ou hybride, est en constante évolution. L’émergence des TIC en enseignement a transformé la forme des cours à distance en augmentant grandement les possibilités de collaboration et d’interaction. Les professeurs ont désormais accès à des outils qui leur permettent de créer un sentiment d’appartenance à un groupe, ce qui était plutôt difficile à réaliser auparavant sans déplacement. L’accélération du développement technologique dans le monde des communications ne s’est pas complètement transposée dans le monde de l’éducation, à tort ou à raison. Il a été prouvé que l’ajout de TICE à un cours sans réfléchir à la portée pédagogique n’a pas d’impact sur les étudiants. Ce constat seul doit porter à réflexion.
Les TICE en elles-mêmes ouvrent de grandes possibilités, particulièrement, mais pas seulement, en formation à distance. Les TICE permettent d’agir où il était difficile de collaborer et d’interagir : sur le sentiment d’isolement des étudiants. Utilisées de façon pédagogique, celles-ci peuvent enrichir un cours et en augmenter la persévérance et la réussite. Tous les modes de diffusion, synchrone, asynchrone, hybride et même l’enseignement traditionnel en classe, peuvent bénéficier des avancées technologiques de l’information et de la communication, à la condition que ces approches soient faites dans un cadre pédagogique efficace.
(Source image principale: geralt/Pixabay)
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